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Page:Genlis — Mémoires inédits, (ed. Ladvocat), T1.djvu/413

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fort étrange. Après la représentation, madame de Bouflers, qui avoit beaucoup de bonté pour moi, me tira à part, pour me gronder de n’avoir pas averti ma tante de la défectuosité de son dos ; je me justifiai en disant que l’avis de sa femme de chambre l’avoit emporté sur le mien ; mais je passai sous silence la circonstance du miroir, parce qu’elle auroit donné un vrai ridicule à ma tante. On joua trois fois cet opéra. Nous jouâmes des proverbes, je fis beaucoup de musique, je fis danser plusieurs fois avec ma harpe : ce voyage fut très-brillant. Madame la maréchale de Beauvau, et madame la princesse de Poix, y passèrent plusieurs jours. La première, sœur de MM. de Chabot et de Jarnac, avoit, je crois, alors trente-cinq ou trente-six ans, et elle étoit, à mon avis, la femme la plus distinguée de la société, par l’esprit, le ton, les manières, et l’air franc et ouvert qui lui étoit particulier. Sa politesse étoit à la fois obligeante et noble ; on voyoit promptement sa supériorité, on ne la sentoit jamais d’une manière embarrassante. Elle avoit dans toute sa personne une aisance communicative. J’ai éprouvé souvent qu’après avoir passé une demi-heure avec elle je n’avois