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Page:Genlis — Mémoires inédits, (ed. Ladvocat), T1.djvu/414

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plus la moitié de ma timidité naturelle. Elle avoit épousé par amour M. de Beauvau[1]; et jamais dans le monde un mari et une femme n’ont eu un maintien d’amour conjugal de meilleur goût et plus parfait. Madame la prin-

  1. M. de Beauvau avoit alors environ quarante-huit ans : il s’étoit fait remarquer à l’armée par son courage et ses connoissances militaires ; dans le monde, par une galanterie noble et chevaleresque. Frère de la maréchale de Mirepoix, amie de madame de Pompadour, M. de Beauvau fut traité par la favorite avec une distinction particulière ; mais cette liaison n’eut jamais le degré d’intimité que quelques personnes ont supposé. Homme de cour sans être courtisan, juste et humain autant que fidèle et dévoué, il se plaça souvent entre le pouvoir et le malheur. Sa longue carrière a été semée d’un grand nombre d’actions généreuses ; toutes n’ont pas été révélées, parce qu’il savoit supporter l’ingratitude, et que la modestie étoit aussi une de ses vertus. Madame de Genlis dit dans ses Souvenirs de Félicie : « Un soir (à l’Île-Adam), la conversation tomba sur la langue françoise ; je me taisois, mais j’écoutois avec le plus vif intérêt tout ce que disoit M. de Beauvau. Je n’ai jamais entendu faire des remarques aussi fines et aussi judicieuses. » Il fut reçu à l’Académie françoise en 1748. On a de lui une lettre à l’abbé Desfontaines, sur une phrase de cent quatre-vingts mots. Né en 1720, mort en 1793.
    (Note de l’éditeur.)