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Page:Genlis — Mémoires inédits, (ed. Ladvocat), T1.djvu/419

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quitter le salon, elle se plaignoit tout bas à ses amis, et surtout à M. le duc d’Orléans, nous la suivions dans sa chambre. Là elle se couchoit sur un canapé et gémissoit pendant trois quarts d’heure, ni plus ni moins. Durant ce temps, madame de Choisy, une de ses amies, et moi, nous lui faisions chauffer des serviettes dans un cabinet voisin ; M. le duc d’Orléans, les larmes aux yeux, restoit auprès d’elle, le comte de Guines étoit congédié au bout de dix minutes. Enfin je devinai le plan de cette comédie, ma tante étoit malade de l’infidélité du comte de Guines. Elle montroit avec franchise toute sa sensibilité à M. le duc d’Orléans, et en même temps elle lui donnoit l’espérance que l’étrange conduite du comte de Guines la guériroit d’une passion aussi malheureuse qu’elle étoit pure. Tout réussit au gré de ses désirs. M. le duc d’Orléans, malgré l’intérêt de son amour, fut si touché de ses souffrances et de ses sentimens, qu’il en prit de l’aversion pour le comte de Guines. C’étoit une chose plaisante que les regards d’indignation qu’il lui lançoit, lorsqu’avec nous il reconduisoit ma tante dans sa chambre ; et lorsque dans le salon il suivoit tous les pas de la com-