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Page:Genlis — Mémoires inédits, (ed. Ladvocat), T1.djvu/427

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de Guînes, sur la flûte, lui persuada que la cour de France ne le lui envoyoit pour ambassadeur que par cette raison. Cette idée choqua le roi, et dans le grand Frédéric c’étoit une petitesse. Le comte, voyant que le roi s’obstinoit à le traiter avec une sécheresse qui alloit jusqu’à la désobligeance, en découvrit le motif et feignit de l’ignorer. Il rencontroit quelquefois un homme qui passoit pour l’un des espions du roi dans la société, et un jour, en présence de cet homme, il dit d’un ton insouciant et léger, qu’il avoit deviné pourquoi le roi ne l’admettoit jamais dans son intérieur, et sur-le-champ il ajouta : « Le roi a des correspondances à Paris, on lui aura mandé que la tournure de mon esprit est épigrammatique et moqueuse. » Quelqu’un se récriant sur le mauvais caractère de celui qui auroit mandé une telle chose : « Non, reprit froidement le comte, il aura dit cela sans malice ; à Paris, ce genre d’esprit n’est qu’un jeu de société, on ne le craint pas. »

Cet entretien, comme le comte l’avoit espéré, fut rapporté au roi, qui, de premier mouvement, s’écria qu’il ne craignoit nullement les épigrammes et les moqueries. Il traita