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Page:Genlis — Mémoires inédits, (ed. Ladvocat), T1.djvu/432

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cours de l’emphase, de l’enflure, des pensées fausses, mais il y a souvent aussi de l’élévation d’âme, et une véritable noblesse, et je n’y vis que cela. M. de Sauvigny, à force de contrarier mon goût pour cet auteur, m’en fit sentir tous les défauts. Il est singulier qu’ayant toujours eu beaucoup de naturel dans l’esprit, j’aie aimé passionnément Marivaux, malgré son entortillage, et Thomas, malgré son emphase, mais c’est que je suis persuadée qu’ils n’affectoient rien, et qu’ils étoient nés avec cette tournure d’esprit. Leurs défauts sont des qualités outrées. Thomas avoit une trop grande manière de voir les choses, Marivaux a poussé trop loin la finesse et la délicatesse. Il faut n’abuser de rien, voilà le goût, et sans le goût par conséquent il n’y a point de perfection en littérature et dans les arts. Ce sont ces deux auteurs, Saint-Lambert et, avant eux, Fontenelle, qui ont gâté la littérature ; en faveur de leurs talens on peut excuser leurs défauts, mais comment leur pardonner d’avoir formé tant de mauvais imitateurs ? Le ton doctoral, l’emphase, les faux brillans déparent presque tous les ouvrages de cette époque jusqu’à nos jours. Rousseau même ne fut pas