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Page:Genlis — Mémoires inédits, (ed. Ladvocat), T1.djvu/45

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roit à l’excès ; on m’emprisonna les pieds dans des souliers étroits, avec lesquels je ne pouvois marcher ; on me mit trois ou quatre mille papillottes sur la tête ; on me fit porter, pour la première fois, un panier ; et, pour m’ôter mon air provincial, on me donna un collier de fer ; en outre, comme je louchois un peu de temps en temps, on m’attachoit sur le visage tous les matins, dès mon réveil, des besicles que je gardois quatre heures[1]. Enfin, je fus bien surprise, quand on me dit qu’on alloit me donner un maître pour m’apprendre (ce que je croyois savoir parfaitement) à marcher. On ajouta à tout cela de me défendre de courir, de sauter et de questionner. Tous ces supplices me firent une telle impression, que je ne les ai jamais oubliés, et je les ai fidèlement dépeints depuis dans la petite comédie de mon Théâtre d’éducation, intitulée : La Colombe. Cependant une grande cérémonie, et ensuite de belles fêtes, me firent bientôt oublier mes chagrins. Je n’étois qu’ondoyée, on me baptisa

  1. Excellente chose pour cette difformité et qui me l’ôta entièrement et sans retour en trois mois. Il est vrai qu’avant je ne louchois pas habituellement.
    (Note de l’auteur.)