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Ce digne mari, qui aurait dû se réjouir de ce que sa femme, qui se livrait auparavant au vin et à tous les genres d’excès avec des esclaves et des ouvriers, non-seulement était changée, mais voulait le changer lui-même, refusa le libelle et l’accusa d’être Chrétienne. Alors, prince, elle vous présenta à vous-même une requête, demandant qu’il lui fût permis de régler ses affaires domestiques, et promettant de répondre ensuite à l’accusation. Vous consentîtes à sa demande.

Son mari ne pouvait plus la poursuivre ; mais alors il tourna sa fureur contre un certain Ptolemée, qui l’avait instruite dans la religion chrétienne, et qu’Urbicus fit mettre à mort. Mais voici comme il parvint à ses fins. Il pria un centurion de ses amis de se saisir de la personne de Ptolemée pour le jeter en prison, et de se borner à lui demander s’il était Chrétien. Ptolemée, qui avait horreur du mensonge et de la moindre dissimulation, n’hésite pas un moment à répondre qu’il est Chrétien. À ce mot, le centurion le jette dans un cachot, dont on le tira après de longues souffrances, pour le conduire devant le tribunal d’Urbicus. Celui-ci lui fit la même question et en obtint la même réponse. Plein d’une noble confiance qu’il avait puisée à l’école de Jésus-Christ, Ptolemée confessa une seconde fois le nom chrétien, car nous ne pouvons nier en pareille circonstance que pour deux raisons : ou parce que nous condamnons la chose dont il s’agit, ou parce qu’elle nous condamne nous-mêmes et nous force à rougir ; mais rien de semblable ne se rencontre dans un vrai Chrétien. Sur la sentence d’Urbicus, Ptolemée est traîné au supplice. Cette injustice révolte un autre disciple nommé Lucius, qui se trouvait là par hasard. Il interpelle le préfet en ces termes : « Pourquoi condamnez-vous un homme qui n’est accusé ni d’adultère, ni de vol, ni d’homicide, ni de rapt ; qui n’est, en un mot, convaincu d’aucun crime, et qui seulement confesse le nom chrétien ? Croyez-moi, Urbicus, ce jugement ne s’accorde pas avec les intentions ni du pieux empereur, ni du philosophe son fils, ni du sacré sénat. » Urbicus, sans autre réponse, dit à Lucius : « Tu me parais aussi faire partie de ces gens-là ? — Oui, certaine-