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ment ! » s’écrie Lucius. Alors le préfet commande qu’il soit aussitôt conduit au supplice. Et Lucius, de son côté, lui rend grâce de ce qu’il le délivrait de pareil maîtres, et lui ouvrait la voie pour remonter vers son père, le roi des cieux. Il en survint un troisième qui fut livré au même supplice.

III. Je m’attends à quelques embûches semblables de la part de ces hommes dont j’ai parlé. Ils me feront aussi attacher au poteau. Je n’échapperai certainement pas à ce Crescent, qui aime le bruit et l’ostentation. On l’appelle philosophe : mérite-t-il ce nom, lui qui ne nous connaît pas et qui, pour complaire à la multitude, nous accuse d’être des impies et des athées ? S’il nous persécute sans nous connaître, n’est-il pas le plus méchant des hommes, bien au-dessous de l’ignorant ? Car celui-ci s’abstient de parler de ce qu’il ne sait pas, et de porter faux témoignage. S’il est instruit de notre doctrine, il n’en comprend donc pas la sublimité ? Et s’il la comprend, d’où vient sa conduite à notre égard ? Craint-il qu’on ne le soupçonne d’être Chrétien ? Dès lors il n’en est que plus lâche et plus indigne. On ne voit en lui que l’esclave de la peur et du préjugé populaire le plus insensé.

Je veux que vous sachiez jusqu’où va son ignorance : j’ai pu m’en convaincre par les différentes questions que je lui ai proposées. Pour que vous soyiez bien convaincu de la vérité, je suis prêt à les renouveler devant vous, si vous ne connaissez pas nos discussions. Prince, cette attention est digne d’un empereur.

Mais si vous avez entendu parler et des questions et des réponses, il est évident pour vous qu’il ne connaît pas notre doctrine, ou que s’il la connaît, la crainte lui ferme la bouche et l’empêche de se prononcer, comme Socrate, pour la vérité. Dès lors ce n’est pas un philosophe, mais un esclave des préjugés, puisqu’il oublie cette maxime de Socrate, si belle et si philosophique : « Si vous respectez l’homme, respectez encore plus la vérité. » Mais vous ne verrez jamais s’élever à cette hauteur un cynique qui résume tout dans l’indifférence et qui ne connaît rien de mieux.