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du polythéisme avaient d’ascendant sur les cœurs dont elles étaient sans cesse ou l’espérance ou l’effroi.

La vie civile des Romains n’était pas moins pleine de cérémonies à la fois politiques et religieuses. La convocation des assemblées, l’élection des magistrats, la forme du vote populaire, tout, dans l’exercice de la liberté publique, était précédé, soutenu, consacré par les auspices ; et si souvent l’habileté du Sénat abusait de leur influence pour rompre les assemblées et pour déconcerter ou servir des intrigues, cette facilité même atteste la superstitieuse bonne foi du peuple. Mais, par l’élévation d’Auguste et le caractère de son pouvoir, la religion n’eut plus de racines dans le patriotisme et les droits les plus chers des citoyens. La longue paix de la puissance romaine interrompit l’usage des auspices militaires, que, d’ailleurs, la jalousie du prince n’aurait pas confié à ses généraux, sans doute de crainte que la religion ne vînt armer l’espérance de quelqu’un d’entr’eux, et qu’au milieu d’un sacrifice sous les yeux des légions, un chef ambitieux n’osât lire dans les entrailles d’une victime des prophéties contre l’empereur.

L’autorité des auspices cessa de même dans Rome, lorsque toute élection fut interdite au peuple, et qu’il ne resta plus aucun vestige de ces assemblées qui jadis s’ouvraient dans le Forum, sous la consécration des cérémonies augurales, pour choisir, en présence des dieux, les magistrats d’un peuple libre. Mais cette nouvelle brèche à la religion de l’état ne date que du règne de Tibère.

Au lieu de ces pratiques religieuses liées à la liberté publique, on eut l’apothéose des empereurs. Le culte, comme l’état, fut profané par leur pouvoir. Auguste en donna l’exemple : lui qui ne souffrait pas qu’on le nommât seigneur, il se laissa nommer dieu. La flatterie des rois alliés lui érigea partout des autels ; et, dans Athènes, un temple commencé pour Jupiter Olympien fut consacré au génie de César Auguste. Un collége de prêtres fut institué sous le nom d’Augustales. L’idolâtrie devint plus grande encore à la mort du prince. Les Romains, dans la sévérité de leur ancienne discipline, avaient admis le