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Page:Genoude - Les Pères de l'Eglise, vol. 2.djvu/325

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rôdaient autour de l’innocence ; le monde était plein de leurs embûches, ils tourmentaient les corps et les âmes. Cette superstition rendait fou.

Ainsi, dans la pureté même du déisme judaïque, germait à cette époque une croyance qui, mal comprise, ramenait le polythéisme ; mais les Juifs, au milieu de cette corruption de leurs lois primitives, restaient un peuple séparé de tous les autres. La conquête passait sur eux sans les atteindre. Ils ajoutaient à leur culte des superstitions de leur choix ; mais ils repoussaient avec horreur les cérémonies du culte romain.

Leur patriotisme et leur religion étaient tellement confondus, que les premiers Juifs qui se firent Chrétiens cessèrent d’être Juifs, et que le reste de la nation n’en fut que plus acharné dans sa haine contre l’univers dissident.

Aussi ce peuple, qui pendant quatre-vingts ans avait tranquillement porté le joug de Rome, trouva-t-il tout à coup un courage extraordinaire pour le briser. Il avait laissé prendre son territoire et ses villes. Il avait souffert les pillages et les tyrannies des gouverneurs romains ; mais quand l’insensé Caligula voulut placer sa statue dans le temple de Jérusalem, le peuple, quoique sans armes, et déshabitué de la guerre, se souleva tout entier, et fit comme une sédition de prières, de gémissements et de désespoir. Le gouverneur n’osa point aller plus avant, et différa l’entreprise, qui fut pour jamais écartée par la mort de Caligula. Mais l’injure était faite, et depuis lors il fermenta chez les Juifs une nouvelle ardeur de délivrance.

Par-dessus toutes les sectes divisées de doctrines, il se forma le parti des zélés, c’est-à-dire de ceux qui voulaient chasser les Romains ou périr sous les ruines du temple. De là ces guerres épouvantables qui firent peur aux Romains eux-mêmes, et leur donnèrent à combattre ce qu’ils n’avaient pas encore rencontré dans le monde, le fanatisme religieux. Ces Juifs, si méprisés à Rome et sur tous les points de l’empire, colporteurs, marchands, astrologues, nourris d’usures et d’affronts, firent sur leur terre natale une résistance héroïque. Le siége de Jérusalem surpassa en horreur celui même de Carthage ;