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Page:Genoude - Les Pères de l'Eglise, vol. 2.djvu/366

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anges pour les femmes naquirent les géants dont les poëtes ont aussi parlé ; mais ne vous en étonnez pas, puisque la sagesse divine diffère autant de la sagesse du monde que la vérité diffère de la simple probabilité. Ainsi s’exprime le prince de la matière, parlant de lui-même :

« Nous avons l’art de mentir, et toujours d’une manière très-vraisemblable. »

XXV. Ces anges qui, tombés du Ciel, sont répandus autour de l’air et de la terre, sans pouvoir désormais s’élever jusqu’au Ciel, de concert avec les âmes des géants, démons errants autour du monde, excitent, les uns, c’est-à-dire les démons, des mouvements conformes à leur nature et à leur constitution ; les autres, c’est-à-dire les anges, les mêmes passions qu’ils éprouvèrent. Pour le prince du monde matériel, comme l’expérience le prouve, il exerce un empire qui s’oppose à la bonté de Dieu. Aussi Euripide s’est-il écrié :

« Une cruelle incertitude agite mon âme. Est-ce le hasard, est-ce Dieu qui gouverne le monde ? Contre toute espérance, contre tout droit, je vois les uns sans foyers, dépouillés de tout, tandis qu’un bonheur constant est le partage des autres. »

Ces succès et ces revers, qui arrivent contre toute attente et toute justice, avaient jeté ce poëte dans une telle incertitude qu’il ne savait plus à qui attribuer le gouvernement des choses de la terre. Et voilà pourquoi un autre poëte s’est écrié :

« À cette vue, comment peut-on dire qu’il existe des dieux ? comment obéir aux lois ? »

Aussi Aristote, de son côté, ne craignit pas d’avancer que Dieu ne s’occupait point des choses qui se passent sous le Ciel. Cependant la providence éternelle de Dieu s’occupe indistinctement de chacun de nous.

« Qu’elle le veuille ou ne le veuille pas, la terre est forcée de produire les plantes et de nourrir mon troupeau. »

Oui, cette Providence veille sur chaque homme, elle rend à chacun selon ses œuvres, et ce n’est pas ici une opinion, mais une vérité ; chaque chose, selon sa nature, suit les lois de