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Page:Genoude - Les Pères de l'Eglise, vol. 2.djvu/384

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embrasse, mon argument conserve toute sa force ; il sera toujours vrai de dire que celui qui a pu donner une figure à une matière grossière, comme tous le reconnaissent, embellir et varier à l’infini cette matière, dépourvue de grâce et de beauté ; que celui qui a pu former un tout harmonieux de tant de parties diverses, faire naître une infinité de corps organisés d’un germe simple et indivisible ; que celui qui a pu arranger et façonner si merveilleusement une matière brute et informe, et animer ce qui était sans vie, il sera toujours vrai de dire qu’il peut aussi rassembler ce qui est décomposé, relever ce qui est tombé en poussière, ressusciter ce qui n’est plus, et rendre incorruptible ce qui avait été soumis à la corruption. Oui, ce Dieu créateur, ce Dieu d’une puissance et d’une sagesse infinie saura bien encore, s’il le faut, démêler et séparer du corps des animaux carnassiers et voraces les lambeaux de chair du malheureux qu’ils auront dévoré ; il saura bien rendre à chaque membre et à chaque partie des membres du corps humain les débris qui lui appartiennent, eussent-ils passé dans une ou plusieurs bêtes féroces, de celles-ci fussent-ils entrés dans d’autres encore, eussent-ils été décomposés avec elles, et avec elles rendus, par l’effet naturel de la décomposition, aux premiers éléments ? Et c’est là néanmoins ce qui embarrassait certaines personnes connues d’ailleurs par leur esprit et leur sagacité ; ces objections vulgaires leur ont paru, je ne sais pourquoi, très-graves, et même impossibles à résoudre.

IV. Voyez ce qu’on nous répète sans cesse : combien d’hommes ont péri misérablement au fond des mers ou des fleuves, et sont devenus la proie des poissons ; combien d’autres, tués dans les combats ou victimes de quelqu’autre malheur, de quelqu’autre accident encore plus déplorable, sont restés sans sépulture, exposés à la voracité des bêtes féroces. Or, quand une fois leurs tristes restes ont disparu, que les membres et les parties des membres dont se composaient ces infortunés se trouvent dispersés dans un grand nombre d’animaux souvent d’espèce différente ; quand ils sont une fois mêlés, confondus avec la chair