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Ainsi, ni Judas, le douzième disciple du Christ, ni le Christ lui-même dans sa passion, n’ont pu être la figure de cet Æon qui a souffert. Car nous avons démontré qu’il n’y a aucun rapport entre ces personnages et ces événements divers : mais de plus, il n’y a aucune coïncidence de nombre. Tout le monde sait, en effet, que le traître Judas était le douzième apôtre, puisque l’Évangile met toujours leur nombre de douze : or, l’Æon dont on parle n’est nullement le douzième, mais bien le trentième, puisqu’on nous dit que les Æons ont été créés au nombre de trente, par la volonté du Père, et que cet Æon est le trentième. Il n’y a donc aucun rapport de nombre entre Judas et entre l’Æon.

Diraient-ils que la mort de Judas est l’image de l’enthymèse de l’Æon qui se sépare de lui, et dont nous avons déjà parlé ? Mais ici encore, il n’y a aucun rapport à trouver ; car cette enthymèse s’étant séparée de l’Æon, reçut du Christ une nouvelle forme ; celui qu’ils nomment le Sauveur lui donna la science infinie ; ensuite, elle créa les choses qui sont hors du Plerum sur le modèle de celles du Plerum, et après cette œuvre, elle rentra dans ce séjour divin, où elle demeure unie au Sauveur, qui a été créé par l’effort réuni des Æons. Rien d’analogue n’est arrivé à Judas ; car une fois retranché du nombre des disciples du Christ, il n’y a pas été admis de nouveau, puisqu’un autre a été admis à sa place. Et le Seigneur a dit, en parlant de lui : « Malheur à celui par qui le fils de l’homme sera trahi ; il vaudrait mieux pour lui qu’il ne fût jamais né ! » Veut-on que Judas, sans être le symbole de l’enthymèse de l’Æon, soit le symbole des angoisses et de la passion de l’Æon ; mais cette hypothèse n’est pas davantage admissible, car Judas appartenait au nombre douze, tandis que l’Æon appartient à un nombre trentenaire. Du côté de l’Æon il y a trois choses : l’Æon, son enthymèse, et sa passion ; avec Judas, il n’y a que deux termes : Judas et Mathias, qui l’a remplacé. Ainsi deux ne peut être ni le type ni le symbole de trois.