Page:Genoude - Les Pères de l'Eglise, vol. 3.djvu/628

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
572
SAINT IRÉNÉE.

apostasie sans faire pénitence, c’est de ces hommes réprouvés que le démon se sert pour blasphémer contre Dieu, maudissant son jugement qui le condamne, remettant sur Dieu même la cause de son apostasie, au lieu d’en accuser sa propre volonté et sa propre pensée ; il fait comme ces malfaiteurs que les lois punissent pour leurs crimes, et qui accusent les législateurs, au lieu de s’accuser eux-mêmes. Ainsi, tous ces hommes qui ont renié Dieu, tourmentés par un esprit diabolique, vomissent mille blasphêmes contre notre souverain créateur, qui nous a fait don de l’esprit du salut et qui a fait une loi égale pour tous et appropriée aux besoins de tous, mais ils ne veulent pas reconnaître la justice de Dieu : Voilà pourquoi ils s’efforcent d’imaginer quelque autre divinité chimérique, qui ne s’inquiéterait ni ne se mêlerait en aucune façon des choses humaines, ou même qui serait indifférente au mal comme au bien.


CHAPITRE XXVII.


Du jugement dernier. Séparation des bons et des méchants. Admission des élus dans le ciel. Tourments éternels des damnés.


Si l’on suppose que Dieu ne juge pas les hommes, c’est, ou parce qu’il n’en a pas le droit, ou parce qu’il donne son assentiment à tout ce qui se fait, au bien comme au mal : mais si Dieu ne juge personne, alors tous seront égaux à ses yeux, et il ne fera ni choix ni séparation. Or, dans cette hypothèse, le dernier avénement du Christ n’aurait aucun motif, il serait même opposé à la volonté d’un Dieu qui ne jugerait personne. Le Christ a dit en effet : « Je suis venu séparer l’homme de son père, la fille de sa mère, et la belle-fille de sa belle-mère ; » de deux qui sont dans le même lit, prendre l’un et laisser l’autre, et de deux femmes qui sont occupées à moudre, emmener l’une sans l’autre ; ou bien, ordonner aux moissonneurs d’arracher d’abord l’ivraie et de la lier en gerbes pour la brûler, puis d’amasser le froment dans le grenier ; ou encore