leil de la vérité, et, participant aux flammes qui en découlent, que notre âme veille avec sagesse et prudence dans le sommeil même. L’oppression qui suit la débauche, les bâillements, les nausées, les mouvements forcés et involontaires qu’elle excite éteignent l’œil de l’âme, et peuplent l’imagination de vains fantômes qui la tourmentent. Sous ce poids qui opprime le corps, l’âme elle-même devient insensible et inanimée. L’excès du dormir est nuisible au corps et à l’âme, et quoiqu’il soit selon la nature, il est contraire à ces actions qui vivent et tournent, sans en sortir, dans le cercle de la vérité. Le juste Loth n’eut pas commis un horrible inceste, si, enivré d’avance par ses filles, un lourd et long sommeil ne l’eut accablé. Soyons sobres, et nous dormirons sobrement. N’éteignons point toute la nuit cette lumière de la raison qui veille et habite en nous. Employons surtout la longueur des nuits, lorsque les jours deviennent plus courts, les hommes à l’étude des lettres ou à l’état que nous exerçons, les femmes au travail utile ou de l’aiguille ou du fuseau. En un mot, combattons sans cesse contre le sommeil, et efforçons-nous, en nous accoutumant sans relâche à le vaincre, de lui arracher le plus de notre vie que nous le pourrons ; car, semblable à un publicain, il fait deux parts de notre vie, nous laissant l’une et prenant l’autre. Ne nous dédommageons pas, en dormant le jour, des veilles, même les plus longues, que nous aurons soutenues la nuit. Ces assoupissements inquiets, ces bâillements prolongés, ces troubles, ces palpitations, ne sont qu’un dégoût passager de l’âme. L’âme n’a pas besoin de sommeil ; car sa nature est d’être dans une perpétuelle activité. Lorsque le corps, auquel elle est unie, s’affaisse et se détend dans le sommeil, n’agissant plus par lui, elle agit et pense par elle seule. De là vient qu’il y a de véritables songes, pensées libres d’une substance spirituelle dégagée du joug des passions, et n’ayant plus entre elle et sa volonté aucun obstacle qui l’empêche de choisir ce qui lui est bon. Si l’âme pouvait complètement cesser d’être active, elle cesserait d’être. C’est pourquoi, lorsqu’elle ne cesse pas d’agir en Dieu et de dompter le corps par les veilles, elle égale la
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