incapables de sentir l’ordonnance d’un discours ou d’en suivre l’enchaînement, ne se sont adressés qu’aux hommes nourris dans les lettres et les sciences, ont réduit à des bornes bien étroites l’amour du bien public.
II. J’ai insisté là-dessus pour défendre contre les accusations de Celse et de ses pareils la simplicité de nos Écritures, qui, comparée à des discours savamment étudiés, semble obscurcie par leur éclat. Nos prophètes, en effet, ainsi que Jésus et ses apôtres, ont voulu que la forme de leur prédication, non-seulement enseignât la vérité, mais captivât l’esprit de la multitude, jusqu’à ce que chacun, gagné et préparé par ces exhortations, s’élevât, selon la mesure de ses forces, à l’intelligence des mystères cachés sous une apparente simplicité. Et pour exprimer ici librement ma pensée, l’élocution si brillante et si soignée de Platon et de tous ses imitateurs n’a porté que peu de fruits, si toutefois elle en a porté, en comparaison de la manière simple et pratique de ceux qui se sont mis à la portée du vulgaire. Aussi Platon, comme on peut le voir, n’est-il qu’entre les mains des hommes lettrés, tandis qu’Épictète excite l’admiration des lecteurs les plus grossiers, qui tous les jours se sentent devenir meilleurs par l’influence de ses préceptes, pour peu qu’ils soient disposés à en tirer quelque profit. Loin de moi le dessein de chercher à rabaisser Platon ! Les nombreuses beautés qu’il a empruntées à l’art humain ont aussi leur usage. J’ai voulu seulement faire connaître quelle est la pensée de ceux qui ont dit : « Mes discours et mes prédications ne consistent pas dans les paroles persuasives de la sagesse humaine, mais dans les preuves sensibles de l’esprit et de la puissance de Dieu, afin que notre foi ne soit pas établie sur la sagesse des hommes, mais sur la puissance de Dieu. »
La divine Écriture nous atteste d’ailleurs que, pour toucher le cœur des hommes, il ne suffit pas que les discours soient vrais et capables de persuader en eux-mêmes,