Page:Gentil, La chute de l’empire de Rabah, Hachette, 1902.djvu/10

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défiance de presque toutes, l’hostilité déclarée de beaucoup.

Comme rien ne s’improvise en ce monde, vous étiez heureusement préparé à votre rôle par une série d’explorations antérieures. Votre éducation d’Africain était complète. Vous saviez comment on traite avec les indigènes, quels sont les moyens de se faire aimer ou de se faire craindre d’eux, par quels procédés et par quelles ressources notre civilisation peut agir sur ces âmes primitives. Vous ne le dites pas expressément, mais je suis sûr que les hommes vous ont créé moins d’obstacles que l’implacable nature. Celle-ci est l’ennemie de tous les jours, l’adversaire avec lequel il faut lutter sans cesse pour se frayer un chemin à travers la brousse, les lianes ou les marais, pour se nourrir ou pour camper. Que de fois elle a exercé votre patience ! Par moments quelle lenteur désespérante que celle de vos convois ! Que de temps, que d’efforts inutilement consumés !

Ainsi que Marchand, vous aviez compris qu’on ne peut pénétrer au cœur de l’Afrique que par les voies navigables, que le bâtiment à vapeur sera le principal conquérant du continent noir. Vous aviez donc, vous aussi, emporté votre bateau. Mais, même en le démontant, comment transporter à dos d’homme des pièces de 200 kilos, pétulant des centaines de kilomètres par des sentiers abruptes, sur des pentes escarpées et glissantes !

C’est là que vos porteurs soudanais ont fait merveille, c’est là que vous avez pu vous convaincre de ce que la France qu’il attendre d’une race si disciplinée, si énergique et si résistante. Nous avons là une réserve indéfinie de soldats de premier ordre.

Ils ne sont pas seulement patients et robustes. Vous les avez vus admirables sur le champ de bataille. Grande journée dans l’histoire de l’Afrique que celle où trois mis-