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Page:Gentil, La chute de l’empire de Rabah, Hachette, 1902.djvu/106

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ville fortifiée de Koussouri dont les murailles, épaisses et hautes, s’étendent sur un front de près de 4000 mètres.

Des maisons bien construites, dont plusieurs sont à étage, dépassent la hauteur des murailles. Koussouri renferme environ 12 000 habitants. Rabah y a installé une garnison nombreuse, avec laquelle il peut commander le pays. Sur les rives, on ne voit personne. À la prière de Youssef, nous faisons marcher le sifflet de la chaudière, mais aucune embarcation ne se détache de la berge.

Nous continuons donc notre route. Peu à peu, les îles se montrent de nouveau. Des villages nombreux, que nous notons sur la carte que nous dressons, apparaissent à nos yeux. Nous sommes en face de Fadjé. Le fleuve immense se divise en deux bras presque d’égale largeur. Celui de gauche conduit à Makari, sur les eaux libres du Tchad. Celui de droite, dans lequel nous nous engageons, nous conduit à Mara, important centre de pêche. Mara renferme 5 000 ou 6 000 habitants. Les énormes pirogues, aux extrémités relevées, n’ont pas moins de vingt mètres de longueur sur deux mètres de largeur. Construites en planches jointes au moyen de petites cordes, on assure leur étanchéité relative avec de la paille tressée.

En réalité, il n’y a plus de fleuve, rien que des îles. Nous sommes dans le delta du Tchad. Nous arrivons bientôt en face de Goulfeï, que nous longeons sans nous arrêter. Nous mettons dix minutes à franchir le front de murailles qui s’étend le long du fleuve. La ville, presque aussi importante que Koussouri, est célèbre par son industrie. Les habitants n’ont point de rivaux pour la teinture et le tissage. C’est un centre commercial très important. Nous marchons encore une heure et demie et nous allons mouiller au village d’Allarada. Youssef prend des informations ; on lui apprend que les garnisons de Koussouri et de Goulfeï se sont repliées sur Dikoa, à trois jours de marche vers l’Ouest, où elles ont rejoint Rabah. Tout le monde est heureux de notre arrivée. Il semble à tous que nous venons délivrer ces gens du joug qui pèse si durement sur eux.