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Page:Gentil, La chute de l’empire de Rabah, Hachette, 1902.djvu/51

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c’était donc un millier de kilomètres à faire pour me réapprovisionner.

Comme il n’y avait pas de temps à perdre, nous nous mettons en route, le 16 juillet, Le Bihan et moi, pour Ouadda. Nous étions en pleine saison des pluies. Trempés jusqu’aux os dans nos pirogues, nous descendons la Tomi, et le 18, nous faisons la rencontre de Prins. Il remontait avec lui le reliquat de ce qu’il avait pu recueillir de nos charges en souffrance sur la route de Loango à Brazzaville, soit une centaine de colis environ composés de tissus et de quelques vivres. Il m’apprenait qu’il restait encore environ deux cents caisses derrière, qu’il ne fallait pas compter revoir, car la route était de nouveau fermée par les indigènes en révolte. Les porteurs loangos avaient abandonné leurs charges dans la brousse et s’étaient absolument refusés à recommencer le portage. Cet événement, qui se renouvelait périodiquement, était dû à une occupation insuffisante de la ligne d’étapes. Il n’y avait pas 50 hommes sur toute la route pour en assurer la sécurité. Les indigènes, pillés par les porteurs suivant les troupes armées à destination du haut fleuve, se vengeaient sur ceux qui passaient ensuite et qui étaient sans défense. Il n’y avait qu’une chose à faire pour parer à cet inconvénient : créer des postes et organiser des patrouilles avec des Européens ; mais comme on manquait d’argent, on ne faisait rien. Il fallait donc, en ce qui nous concernait, que nous nous en tirions par nos propres moyens. Heureusement, par compensation aux nouvelles peu agréables que me donnait Prins, il était porteur d’une lettre du Commissaire général, M. de Brazza, qui avait repris la direction des affaires, lettre pleine de promesses et de précieux encouragements pour moi[1].

Cette lettre, en effet, me confirmait que décidément M. de Brazza approuvait ma conduite et qu’il avait l’intention de nous venir en aide. C’était l’avenir assuré, mais le présent était là, moins agréable ; il fallait se procurer des perles. Je continuai donc mon voyage sur Mobaye.

  1. Voir Note 3.