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Page:George Eliot Adam Bede Tome 1 1861.djvu/259

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adam bede.

mauvaise chose, et Martin Poyser était tout à fait décidé à ne pas commettre un semblable péché, puisque l’argent gagné par de tels moyens ne pouvait profiter.

« Cela fait presque démanger les doigts d’être vers le foin, à présent que le soleil brille, observa-t-il comme ils traversaient le Grand-pré. Mais c’est une triste folie que de croire gagner quelque chose en allant contre sa conscience. Voilà ce Jim Wakefield, qu’on appelait habituellement le « monsieur Wakefield, » qui avait coutume de faire du dimanche un jour de travail, ne s’inquiétant ni du bien ni du mal, comme s’il n’y avait ni dieu ni diable. Où en est-il maintenant ? Eh bien, je l’ai moi-même vu, le dernier jour de marché, portant un panier d’oranges.

— Ah ! certainement, dit madame Poyser avec énergie, vous fabriquez un triste piège pour attraper le bonheur, si vous l’amorcez avec le péché. L’argent que vous gagnez ainsi fera probablement des trous dans vos poches. Je ne voudrais pas laisser à nos garçons une pièce de dix sous qui n’eût pas été gagnée honorablement. Et quant à ce qui est du temps, il y a quelqu’un là-haut qui le fait et à qui nous pouvons nous en remettre ; ce n’est rien en comparaison du tourment que donnent les servantes. »

Malgré l’interruption dans leur marche, l’excellente habitude qu’avait la pendule de madame Poyser de prendre du temps à l’avance les fit arriver au village un quart d’heure même avant le moment voulu, quoique presque tous ceux qui avaient l’intention de se rendre à l’église fussent déjà près des portes du cimetière. Les personnes restées à la maison étaient surtout des mères, comme Bess Timothée, qui se tenait devant sa porte, donnant le sein à son bambin avec le sentiment qu’ont toutes les femmes dans cette situation, qu’on ne peut rien exiger d’autre d’elles.

Ce n’était point tout à fait pour assister aux funérailles de Thias Bede que les hommes se tenaient près du cime-