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Page:George Eliot Adam Bede Tome 2 1861.djvu/297

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adam bede.

car ça m’aurait aidé à m’en préserver. J’ai lutté ; je n’ai jamais eu l’intention de lui faire tort. Je vous ai trompé plus tard, et cela a conduit à un mal encore pire ; mais je croyais y être forcé, je pensais que c’était ce que j’avais de mieux à faire. Et dans cette lettre je lui disais de me faire savoir si elle se trouvait dans quelque embarras ; ne croyez pas que je n’eusse pas fait tout ce qui m’était possible. Mais j’ai mal agi dès le commencement, et il en est résulté un mal horrible. Dieu sait que je donnerais ma vie si je pouvais le détruire. »

Ils s’assirent de nouveau en face l’un de l’autre, et Adam dit en tremblant :

« Quel air avait-elle quand vous l’avez quittée, monsieur ?

— Ne me le demandez pas, Adam ; il me semble quelquefois que je vais devenir fou en pensant à ses regards et à ce qu’elle m’a dit, et encore que je n’ai pu obtenir sa grâce complète, — que je n’ai pu lui éviter le sort terrible d’être déportée, — que je ne pourrai rien faire pour elle pendant toutes ces années, et qu’elle peut en mourir sans jamais retrouver encore quelque douceur dans la vie.

— Ah ! monsieur, dit Adam, sentant pour la première fois son chagrin se fondre dans sa commisération pour Arthur, vous et moi penserons souvent à la même chose, lorsque nous serons séparés par une grande distance. Je prierai Dieu de vous venir en aide comme je le prie de me soutenir !

— Mais il y a cette douce femme, — cette Dinah Morris, dit Arthur en poursuivant le cours de ses pensées et sans savoir quel avait été le sens des paroles d’Adam ; elle dit qu’elle restera avec elle jusqu’au dernier moment, — jusqu’à ce qu’elle parte ; et la pauvre créature s’attache à elle comme si elle y trouvait quelque force. Je pourrais adorer cette femme ; je ne sais ce que je pourrais faire si elle n’était pas près d’elle. Adam, vous la verrez quand elle reviendra ici : je n’ai rien pu lui dire hier, — rien de ce