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Page:Georgel - Mémoires pour servir à l’histoire des événements de la fin du 18e s. depuis 1760 jusqu’en 1806-10, tome 1.djvu/12

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extraordinaire, et, dans le même travail, l’abbé Georgel fut nommé secrétaire d’ambassade. Le baron de Breteuil, qui se voyait arrêté dans la carrière de l’ambition et des honneurs, voua, dès ce moment, une haine implacable au prince coadjuteur, haine qu’il fit rejaillir plus d’une fois sur son protégé, et que des malheurs communs n’ont pu même assoupir[1]. C’est dans la malheureuse affaire du collier qu’on la verra éclater avec fureur et produire l’explosion la plus terrible.

Le prince Louis, qui aimoit naturellement la magnificence, fit d’immenses préparatifs et des dépenses exorbitantes pour le train de sa représentation à Vienne. Tout y étoit vraiment magnifique, et rien n’avoit été négligé pour lui donner le plus grand appareil ; on peut en juger par le temps seul qu’on mit à ces apprêts ; ils durèrent trois à quatre mois. L’abbé Georgel sut mettre à profit ce temps précieux, pour s’initier dans les mystères de la diplomatie, étude à laquelle il avait été jusqu’alors étranger. Il s’enfonça dans les bureaux et le dépôt des affaires étrangères ; il y travailla assidûment, et y recueillit tous les documens et les instructions qui lui et étoient nécessaires pour l’exercice de ses nouvelles fonctions. Il devoit aussi avoir pour guide à Vienne, l’ancien envoyé près de cette cour, M. Durand, vieux diplomate blanchi sous le harnois. Mais la source la plus abondante d’instructions où il devoit puiser, c’était dans

  1. Cette haine étoit si envenimée, que le baron de Breteuil, pendant l’émigration, présenta à la cour de Vienne une note très-virulente contre l’abbé Georgel, prétendant qu’il s’occupoit de la rédaction de mémoires dans lesquels la réputation de la reine Marie-Antoinette devoit être compromise. Cette note n’atteignit pas le but du baron, qui étoit de troubler la sûreté et la tranquillité de l’abbé dans les États autrichiens, et ladite note lui ayant été communiquée pour y répondre, il n’eut pas beaucoup de peine à détruire les mauvaises impressions que l’on cherchoit à donner contre lui.