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Page:Georges Damian Les Debuts amoureux 1928.djvu/7

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ii

Préparations


Je me souviens de ces choses puériles avec une sorte de pitié attendrie. Certes, on ne voudrait pas les revivre. Il est trop certain que l’on possède la jeunesse sans en goûter les joies, on a la chasteté en la regrettant, on a mille désirs confus qui vous taraudent sombrement. Bref, on est pur sans racheter ce que l’ignorance des réalités vivantes a de pénible et certains l’oublient trop en vantant la fraîcheur adolescente.

Car pour jouir vraiment de ce que l’on a, il faut en cultiver la précise conscience. C’est cette conscience qui, par malheur, manque chez les enfants. On ne sait pas alors ce dont on dispose comme sources de bonheur, on ne sent que ce qui manque. Et il manque tant…

Je sortais donc le soir. C’est une chose amusante à cet âge, et lorsqu’on a vécu jusque-là dans les livres, sans contacts réels avec la vie. On se sent, en effet, libéré des attaches et des conseils familiaux. On se croit nanti de toutes les libertés humaines et divines, on est grisé de satisfaction et on se trouve au sommet du bonheur, sans désirer parfois plus.

Je n’ose certifier, au demeurant, que ce soit là le sentiment, la pensée de tous les jeunes gens de cet âge, mais c’était incontestablement le mien.