Aller au contenu

Page:Georges Damian Les Debuts amoureux 1928.djvu/8

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
— 6 —

Je sortais et je me promenais au long des avenues. Les becs de gaz répandaient leur clarté légère et verdâtre sur les choses. Les passants restaient rares. Les arbres sentaient bon, car il y avait tout un boulevard, dans ma cité natale, tout planté de tilleuls, et on sait que le bachot se passe en juillet, époque où les tilleuls commencent à parfumer l’air. J’allais au hasard d’un pas lent. Tout m’était curieux et étonnant. Tout me semblait comporter une sorte d’initiation que je me sentais en mesure d’acquérir tout de suite, ce qui me la faisait sans cesse retarder…

Et souvent je fus aussi accosté par des femmes. Elles me parlaient avec douceur et respect. Leur corps était à ma disposition pour tout ce que j’en voudrais faire. Nous conversions dans des venelles étroites. On entendait, venant d’une rue voisine, un piano sur lequel une jeune fille de la bonne bourgeoisie jouait La Prière d’une vierge. Le ciel était piqueté de mille étoiles, l’air tendre et les paroles féminines qui m’étaient adressées avaient je ne sais quelle volupté cachée que seul je devinais.

Et puis, je quittais la femme, tout heureux de me libérer d’un désir qui me semblait une sorte d’hommage à ma force d’âme et je repartais devant moi en ruminant ce que celle-là m’avait dit, et en méditant sur les cachettes de son corps…

Mais après plusieurs de ces aventures, je commençai à me trouver bien sot, parce que je sentis pourtant qu’en réalité la timidité seule m’arrêtait de pousser plus loin les amitiés avec ces filles dévouées, cour-