Page:Germain - Œuvres philosophiques, 1896.djvu/394

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a pu, suivant Sophie Germain, créer et adopter la croyance à l’âme immatérielle et immortelle et à l’éternité d’un Dieu unique. Pour tous ces points, placés pour elle en dehors des limites imposées au domaine scientifique, Sophie Germain ne semble ni convaincue par le raisonnement qu’elle esquisse ni désireuse de les rendre plus décisifs. C’est par ce scepticisme résigné plus encore que dédaigneux qu’elle a mérité, sans doute, les louanges d’Auguste Comte. « Malgré ces formes absolues de l’enseignement philosophique, l’homme doué d’un esprit juste, dit-elle, sentait au fond de sa conscience que l’étude ne pouvait le conduire à aucune certitude véritable ».

Sophie Germain félicite son siècle d’avoir renoncé à beaucoup d’antiques erreurs. « Nous conservons cependant, dit-elle, dans nos argumentations, l’invariable habitude de juger la nature des choses par la possibilité de nous en former une idée. Ainsi, nous disons hardiment que la matière est divisible à l’infini parce qu’il nous est facile de continuer à l’infini l’opération arithmétique de la division, nous disons qu’elle ne peut penser parce qu’elle est divisible à l’infini, et, cependant, nous ne savons toutes les choses ni a posteriori, puisque l’expérience ne saurait les atteindre, ni a priori, puisque la matière ne nous étant connue que par de simples perceptions, nous ignorons complètement son essence ».

Le scepticisme de Sophie Germain a ses bornes ;