Page:Germaine de Stael - Lettres et pensées du maréchal prince de Ligne, Paschoud, 1809.djvu/14

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Ségur, est véritablement un chef-d’œuvre. Il n’est point travaillé comme ces portraits qui servent plutôt à faire connoître le peintre que le modèle. Vous voyez devant vous celui que le Prince de Ligne vous décrit : il donne de la vie à tout, parce qu’il ne met de l’art à rien. Ceux qui le connoissent savent qu’il est impossible d’être plus étranger à toute espèce de calcul ; ses actions sont toujours l’effet d’un mouvement spontané : il comprend les choses et les hommes par une inspiration soudaine, et l’éclair, plus encore que le jour, semble lui servir de guide.

Adoré par une famille charmante, chéri par ses concitoyens, qui voient en lui l’ornement de leur ville, et s’en parent aux yeux des étrangers comme d’un don de la nature, le Prince de Ligne a prodigué sa vie dans les camps, par goût et par entraînement, bien plus que sa carrière militaire ne l’exigeoit. Il se croit né heureux, parce qu’il est bienveillant, et pense qu’il plaît au sort comme à ses amis. Il jouit de la vie comme Horace,