Page:Germaine de Stael - Lettres et pensées du maréchal prince de Ligne, Paschoud, 1809.djvu/200

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tomboit presque tous les jours dans le camp.

A présent nous avons un froid de chien. Le bois pour faire la cuisine commence à nous manquer. Je brûle déjà tous mes chariots : un timon pour me faire à dîner, et une petite roue pour mon souper.

Je reçois de fort mauvaises nouvelles de chez nous. Quelques généraux se sont trompés dans le Bannat. Heureusement que le maréchal Lacy, par son activité et son intrépidité ordinaire, a tout réparé, sauvé, raccommodé. Il vouloit même encore, en revenant, prendre Belgrade.

Faut-il vous raconter des accidens ? J’ai vu sauter un magasin à poudre à Kinburn : plusieurs officiers-généraux d’état-major, et plus de 4 ou 500 hommes ont été tués ou blessés. J’ai vu sept chasseurs qui dormoient sur le bord de la mer, près de ma tente, tués par l’imprudence de quelqu’un qui s’est approché avec une lumière d’un canon qu’il ne croyoit pas chargé. Voulez-vous du pittoresque ? Quatre-vingt voiles que le Capitan-Bacha s’est donné la peine de nous amener près de l’île fortifiée de Berezan. Je l’ai vu, l’autre jour, lui-même, très-près de la côte, avec sa belle barbe blanche, la sonde à la main, comme s’il vouloit nous tourner par une descente. Il