Page:Germaine de Stael - Lettres et pensées du maréchal prince de Ligne, Paschoud, 1809.djvu/226

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vous : je vous remercie de votre fidélité. Allez aux Pays-Bas ; Faites-les revenir à leur Souverain, et si vous ne le pouvez pas, restez-y ; ne me sacrifiez pas vos intérêts, vous avez des enfans. —

Toutes ces paroles m’ont si vivement ému, et sont tellement gravées dans ma mémoire, que Votre Majesté Impériale peut être sûre qu’il n’y en a pas une qui ne soit de lui. Ma conduite sera ma réponse : il est inutile que j’en rapporte les mots entrecoupés de pleurs. A-t-on répandu quelques larmes quand j’ai été administré ? dit l’Empereur à madame de Chanclos qu’il vit un instant après. Oui, répondit-elle ; j’ai vu, par exemple, le Prince de Ligne tout en pleurs. — Je ne croyois pas valoir tant que cela, dit l’Empereur, presque gaîment.

Du reste, Madame, le dirai-je, à la honte de l’humanité ? j’ai vu périr quatre grands Souverains : on ne les regrette qu’un an après leur mort ; on espère les six premiers mois, et l’on fronde les six autres. Cela se passa ainsi quand Marie-Thérèse mourut. On sent bien peu la perte que l’on fait. Les curieux, les indifférens, les ingrats, les intrigans s’occupent des nouveaux règnes. Ce n’est que dans un an que le soldat dira : Joseph II a essuyé bien des