Page:Germaine de Stael - Lettres et pensées du maréchal prince de Ligne, Paschoud, 1809.djvu/292

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cabaret, à la situation du prince Eugène après sa victoire de Zenta, ou à celle de M. de Voltaire à la première représentation de Mérope ! Tout se compense et tout s’achète dans la nature, mais on est de plus noble race quand on fait en ce genre de grandes dépenses : elles attirent les grands revenus.

On devroit travailler davantage sur son humeur, et se demander souvent, surtout en vieillissant, si l’on n’a pas eu tort de dire, de voir, et de désapprouver comme on le fait. Il n’y auroit pas tant de grognons dans le monde, et surtout parmi les femmes. Un rien les met en colère, parce que le malheur de n’être plus jeunes leur donne cette aigreur qui leur fait croire que les raisons sont la raison. Les raisons sont presque toujours des déraisons. Il faudroit renaître pour juger : la fin de la vie donne quelquefois trop d’humeur contre le commencement.

Je n’aime pas qu’on donne le nom d’honnêtes gens à ceux qui ne volent pas parce qu’ils sont riches ou qu’ils ont peur d’être pendus : et je déclare dignes de l’être tous ceux qui ne font pas autant de bien qu’ils le peuvent, qui s’aiment