Page:Germaine de Stael - Lettres et pensées du maréchal prince de Ligne, Paschoud, 1809.djvu/39

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surtout de mon régiment, qui me carressoient presque, et me demandoient pardon de m’avoir quitté.

L’heure de la présentation sonna. Le Roi me reçut avec un charme inexprimable. La froideur militaire d’un quartier — général se changea en accueil doux et bienveillant. Il me dit qu’il ne me croyait pas un fils aussi grand. Il est même marié, Sire, depuis un an. — Oserais-je vous demander avec qui ? (Il avoit souvent cette expression, et aussi : si vous me permettez d’avoir l’honneur de vous dire.) Avec une Polonoise, une Massalska. — Comment une Massalska ? Savez-vaus ce que sa grand-mère a fait ? Non, Sire, lui dit Charles. — Elle mit le feu au canon au siège de Dantzic ; elle tira et fit tirer, et se défendait lorsque son parti, qui avait perdu la tête, ne songeait qu’à se rendre. — C’est que les femmes, dis-je alors, sont indéfinissables : fortes et foibles tour à tour ; indiscrètes, dissimulées, elles sont capables de tout. — Sans doute, dit M. de Lille, fâché de ce qu’on ne lui avoit encore rien dit, et avec une familiarité qui ne devoit pas réussir ; — sans doute, voyez… dit-il : le Roi l’interrompit. Je citai bientôt quelques traits à l’appui de mon opinion, comme celui de la femme Huchet, au siége d’Amiens. Le