Page:Germaine de Stael - Lettres et pensées du maréchal prince de Ligne, Paschoud, 1809.djvu/44

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alors : il y aura quelqu’occasion ; je l’ai cherchée, je l’ai trouvée à Torgau. Le Roi ne fit jamais un plus beau panégyrique de personne : car il le motivoit en convenant que c’étoit M. de Lacy qui avoit nettoyé la Moravie, la Bohême, la Lusace et la Saxe ; et assurément le Roi ne savoit pas que je lui fusse attaché comme je le suis : d’ailleurs, il n’y a jamais de compliment quand on cite des faits.

Le lendemain le Roi vint me dire, dès qu’il me vit, et avec l’air le plus pénétré : — Si vous devez apprendre la perte d’un homme qui vous aimoit, et qui honoroit l'humanité, il vaut mieux que ce soit de quelqu’un qui la sent aussi vivement que moi. Le pauvre Prince Charles n’est plus. D’autres sont faits peut-être pour le remplacer dans votre cœur y mais peu de Princes le remplaceront pour la beauté de son ame et pour toutes ses vertus. En me disant cela, son attendrissement devint extrême. Je lui dis : — Les regrets de V. M. sont une consolation ; et elle n’a pas attendu sa mort pour dire du bien de lui. Il y a de beaux vers à son sujet dans le poëme sur l’art de la guerre. — Mon émotion me troubloit malgré moi ; cependant je les lui rappelai. L’homme de lettres parut me savoir gré de ce que je les savois par cœur. Son passage