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— Ah !… doucement, ma chère Toinette, ne va pas si vite !… Ah ! coquine… tu me fais mourir de plaisir, va vite !… Eh ! vite !… Ah ! je me meurs !…

Surpris d’entendre de pareilles exclamations, dont je ne sentais pas toute l’énergie, je me rassis ; à peine osais-je remuer. Si l’on m’avait su là, j’avais tout à craindre ; je ne savais que penser, j’étais tout ému.

L’inquiétude où j’étais fit bientôt place à la curiosité. J’entendis de nouveau le même bruit, et je crus distinguer qu’un homme et Toinette répétaient alternativement les mêmes mots que j’avais déjà entendus. Même attention de ma part. L’envie de savoir ce qui se passait dans cette chambre devint à la fin si vive qu’elle étouffa toutes mes craintes.

Je résolus de savoir ce qui en était. Je serais, je crois, volontiers entré dans la chambre d’Ambroise pour voir ce qui s’y passait, aux risques de tout ce qui aurait pu arriver.

Je ne fus pas à cette peine. En cherchant doucement avec la main si je ne trouverais pas quelque trou à la cloison, j’en sentis un qui était couvert par une grande image.

Je la perçai et me fis jour. Quel spectacle ! Toinette, nue comme la main, étendue sur son lit, et le Père Polycarpe, procureur du couvent, qui était à la maison depuis quelque temps, nu comme Toinette, faisant… quoi ? ce que faisaient nos premiers parents quand Dieu leur eut ordonné de peupler la terre, mais avec des circonstances moins lubriques.

Cette vue produisit chez moi une surprise mêlée de joie et d’un sentiment vif et délicieux qu’il m’aurait été impossible d’exprimer.

Je sentais que j’aurais donné tout mon sang pour