avoit tiré cette eau admirable, dont j’avois
éprouvé la vertu, & en me donnant
quelques paſtilles qu’elle y prit)
tu auras ſoin de manger cela : ſurtous,
Saturnin, ſois diſcret, ne parle à perſonne
de tout ce que nous avons fait.
Je l’aſſurai d’un ſecret éternel, nous nous
embraſſâmes pour la derniere fois & je
la laiſſai bien perſuadée qu’elle venoit
de recevoir l’offrande de mon pucelage.
Madame Dinville étoit reſtée dans ſon apartement : elle m’avoit avertie de faire en ſorte que l’on ne m’aperçût pas, l’obſcurité me favoriſoit ; je traverſois une antichambre, quand je me vis arrêté, par qui ? par Suzon. Sa vûë me rendit immobile, il ſembloit que ſa preſence me reprochât les plaiſirs que je venois de goûter, mon imagination d’intelligence avec mon cœur pour m’accabler, la rendoit témoin de tout ce que je venois de faire. Elle me prit la main, & demeura ſans parler : la confuſion me faiſoit baiſſer la vûë. Inquiet cependant de ſon ſilence, je ne confiai qu’à mes yeux le ſoin de lui en demander la cauſe, je les levai ſur elle : je m’aperçus qu’elle verſoit des larmes ; ce ſpectacle me perça le cœur, Suzon y reprit dans le moment l’empire que les