qui t’aime plus que ſa vie ? Oüi, Saturnin,
je t’aime, tu m’as inſpiré pour
toi une paſſion ſi violente, que je mourrois
de douleur ſi tu n’y repondois pas.
Tu te tais, pourſuivit-elle, ah, je ne le
vois que trop ! Ton cœur ne ſe faiſoit
pas de violence pour ſuivre une rivale
que je vais haïr à la mort ; car elle t’aime,
je n’en ſaurois douter, tu l’aime
auſſi, tu n’étois occupé que du plaiſir
qu’elle ſe promettoit, tu ne ſongeois
guéres à la douleur que tu m’allois cauſer,
j’en ſuis encore pénétrée, peux-tu
la voir ſans en reſſentir toi-même ? Attendri
par des reproches dont l’éloquente
facilité me faiſoit reconnoître les impreſſions
de l’amour que je venois moi-même
d’éprouver, en exprimant à Madame
Dinville des ſentimens qui, quoique
momentanés, prenoient leur ſource
dans mon cœur, & naiſſoient de la
paſſion que ſes careſſes y avoient allumée.
Suzon, repondis-je, tu déchires
mon cœur par tes plaintes, ceſſe-les,
n’accables pas ton malheureux frere, tes
larmes le déſeſperent, je t’aime plus que
moi-même, je t’aime plus que je ne
peux dire ! Ah, reprit-elle, tu me rends
la vie, ne penſes donc plus qu’à moi,
depuis hier toi ſeul m’occupes, ton ima-
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Portier des Chartreux.