qui ſe preſenteroit, ne balanceroit pas
entre nous deux, & c’étoit cette préférence
que je redoutois. Je compris
que les plaiſirs de l’amour, quoique
goûtés dans le miſtere, n’en étoient ni
moins vifs ni moins piquans, que la
retraite pouvoit me procurer ces plaiſirs
auſſi aiſément que le grand monde :
je ne penſai plus, je n’agis plus
qu’en conſéquence de ce ſiſtême, & je
paſſai bien-tôt pour une Devote du premier
ordre. J’étois charmée du progrès
de mon ſtratagème, & je ne ſongeai
qu’à noüer quelque intrigue ſecrete
à l’ombre de cette haute reputation
de vertu où je m’étois miſe.
Cette reputation parut équivoque à un jeune homme que j’avois autrefois vû à la grille : il m’étoit arrivé une avanture cruelle à ſon ſujet. J’interrompis en cet endroit ma Devote : je me rapellois ce que Suzon m’avoit autrefois appris de la Sœur Monique, ſon averſion pour le Couvent, ſa paſſion pour l’Amour, la ſcène qu’elle avoit euë avec Verland, le caractere, le ſéjour que ſa Mere avoit fait dans le Couvent, je confrontois le portrait de cette Sœur avec le charmant minois que j’avois devant les yeux ; j’allai plus loin.