Page:Gervaise de Latouche - Le Portier des Chartreux, 1889.djvu/157

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Sur tout ce que j’avais vu faire aux révérends, étant chez Ambroise, et en dernier lieu sur les galanteries du père Polycarpe et de Toinette, j’avais conçu les idées les plus riantes de l’état monacal. Je croyais que le froc était l’habit sous lequel on eût le plus libre accès dans le temple du plaisir. Mon imagination s’enivrait des chimères agréables qu’on se forgeait. Elle ne s’arrêtait pas dans les bras de Toinette, elle me représentait les plus aimables femmes des lieux où mon sort me conduisit, se disputant la conquête du père Saturnin, prévenant ses désirs par l’attention la plus tendre, et payant ses bontés par les transports les plus vifs et les plus délicieux. On croira facilement qu’étant dans de pareilles dispositions je reçus avec joie l’habit de l’ordre, dont le père prieur (qui s’attacha d’abord à moi avec une affection vraiment paternelle) m’honora dès le lendemain de mon arrivée.

J’avais appris assez de latin de mon curé, qui pourtant n’en savait guère pour figurer avec honneur dans le noviciat. On me louait de quelques dispositions assez heureuses ; en ai-je profité ? Hélas ! non. À quoi m’ont-elles servi ? À être portier ; belle avance !

En écrivain fidèle, je me croirais obligé de mener mon lecteur, année par année, jusqu’en théologie ; on me verrait novice, puis profès, enfin un vénérable père. J’aurais mille belles choses à lui dire ; mais les belles choses ne nous