Page:Gervaise de Latouche - Le Portier des Chartreux, 1889.djvu/158

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plaisent qu’autant qu’elles nous intéressent. Eh ! quel intérêt prendrait on à voir un penaillon disputer envers et contre tous, mettre le bon sens et la raison à la gêne dans des arguments en baroco, dans des distinctions subtiles que lui-même n’entendrait pas ? J’en fais grâce.

Je sens pourtant que je ne saurais passer crûment sur un si long espace de temps sans parler de quelques bagatelles. Mon séjour dans le couvent avait éclairé mes idées : j’y avais appris, malgré moi, que si le plaisir était fait pour les moines, il ne l’était pas pour les moinillons. Me repentant d’avoir fait vœu, et désirant en même temps arriver à la prêtrise, que je regardais comme le terme de mes peines, je me laissais endormir par le prieur, qui me vengeait du mépris que l’on affectait pour moi, parce que j’étais le fils d’un jardinier et que je surpassais les autres par mes études.

L’on m’avait tant de fois reproché ma naissance que j’en étais honteux, Toinette était devenue pour moi un fruit défendu ; toujours entourée par les supérieurs, pouvait-elle être accessible à un novice ? D’ailleurs, je ne trouvais plus Suzon ; elle avait disparu de chez Mme Dinviile, après mon entrée chez les célestins. On n’avait appris aucune de ses nouvelles. Sa perte m’avait plongé dans la douleur ; je l’aimais, un je ne sais quoi, plus fort que son tempérament, m’attachait à elle. Les lieux où je l’avais vue, où nos cœurs