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sement sous les guirlandes et les draperies des reposoirs ; que les sénateurs en toges rouges, les chanoines en manteaux violets, les pénitents noirs encapuchonnés et les confréries multicolores s’allongeaient en interminables files sous les arbres touffus de nos boulevards ou de chaque côté de nos places transformées en parterre embaumé. Oh ! que c’était beau ces choses auxquelles tout le monde en ce temps-là, même ceux qui les prescrivaient, croyaient simplement et sincèrement !…

Et que d’autres souvenirs me reviennent ! Les mascarades du Mardi-Gras ! Ces fringants cavaliers caracolant gracieusement sous les fenêtres des belles dames, revêtus des magnifiques travestissements loués si cher chez Stobitz, le tailleur en vogue de la place Saint-Léger. Enfin ! enfin le terrifiant spectacle de la promenade du pendu !…

Oh ! combien de fois j’ai revu dans mes rêves cet homme pâle, marchant courbé et tremblant entre les deux aides du bourreau, sentant à chaque mouvement le sinistre ef froid attouchement de cette corde qui, quelques minutes plus tard, devait l’étrangler ! Que de fois j’ai entendu le son sec et intermittent des sous tombant dans la sébille des archers noirs, ces sous destinés à payer les messes de Requiem pour l’âme du condamné ! Le tintement du cuivre et le glas funèbre sonné dans toutes les églises marquaient seuls le pas du sinistre convoi !…

Tout cela est oublié aujourd’hui : pompes roya-