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su porter le parasol des dames mieux qu’un fagot de buis de la montagne ou une corbeille de pommes au marché. »

Il est clair qu’avec de tels sentiments, la pauvre mère ne voyait pas avec plaisir son fils, son orgueil et sa préférence, devenir amoureux du « Quinsonnet. »

Les remontrances n’avaient pas manqué au jeune homme : « Que feras-tu, disait-elle parfois, d’une fille qui ne peut pas seulement porter trois cartans de blé au moulin ? La vois-tu à l’herbe avant le soleil levant ? Est-ce elle qui dépense beaucoup d’huile pour la veillée du samedi ? Va, va ce n’est pas avec des chansons que l’on élève une famille, que l’on paye une cense (fermage) et que l’on se met quatre sous de côté. Il ne te manque pas de quoi mieux choisir ici et ailleurs, si tu veux prendre femme ce qui ne presse pas encore, Dieu merci ! »

Mais Lallò laissait gronder sa mère, et retournait toujours, malgré lui, rôder autour de la jolie paysanne. Dans le pays, on ne trouvait pas qu’il fît bien, et nombre de bonnes langues disaient que cela tournerait mal. Nous qui ne savions pas, au fond, ce que c’était que l’amour, et à quoi ces allées et venues de Lallò devaient aboutir, nous prenions fait et cause pour Marianne elle était si jolie, et nous amusait tant !

Dans nos courses à travers les villages de la commune, nous trouvions toujours le temps de nous arrêter chez les Desait. Souvent, nous étions