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chute que l’enfant a gardé cette cicatrice ; mais comment a-t-elle pu vivre après un si terrible accident ?…

— Ah Madame, c’est comme on dit chez nous : Dieu veut bien ce qu’il veut. — Cette petite a été sauvée où il y en a mille qui se seraient tuées… C’est vrai qu’il y avait bien déjà assez de morts comme ça !…

— Mais, continua la curieuse dame, heureuse de pouvoir mettre la borgnesse sur un chapitre qui l’intriguait depuis longtemps, mais sont-ils donc morts tous les trois à la fois, le père, le mari et la femme ?

— Non, Madame, le jeune Mousieur, lui, est mort dans son lit, mais las ! ça n’a pas été moins triste, allez !

— Est-il mort avant ou après sa femme, Marguerite ?

— Seulement quatre heures après, Madame.

Puis, baissant la te, la vieille femme ajouta entre ses lèvres :

— Que le bon Dieu ait son âme tout de même ; mais celui-là il s’est fait périr de sa volonté.

Sans doute, c’était la première fois que ce secret sortait de sa bouche, car grand’mère leva la tête avec un effroi mêlé de pitié et s’écria :

— Oh ! le malheureux qu’il lui soit fait miséricorde !

— Ainsi soit-il, pauvre brave dame, reprit Marguerite. Cependant, voyez-vous, il ne faudrait pas