Page:Gex - Vieilles gens et vieilles choses (1885).pdf/162

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 155 —

être dans une promenade, mais voilà qu’au bout. d’un peu de temps il vint chez nous passer la soirée avec les autres.

Tout de suite il devint le Benjamin du vieux Monsieur Desroches : c’est que ce Monsieur en valait bien trois autres pour faire rire et raconter des histoires longues comme des prônes.

Notre demoiselle, qui commençait à penser à autre chose qu’aux poupées, me parlait à toutes les heures du jour de M. Emmanuel D***, et qu’il était gai, instruit, bon enfant, qu’il gagnait beaucoup d’argent à Paris rien qu’en écrivant dans des livres ce qui lui venait en tête. Elle me disait qu’il était… qu’il était… enfin, encore plus avancé que ceux qui font les gazettes.

— Peut-être était-ce un romancier ? insinua Madame Panissot, très littéraire de sa nature.

Marguerite hésita un moment, puis répondit :

— Je vous demande pardon, Madame, ce n’est pas ce nom-là.

— Alors ce sera poète, continua la dame se parlant à elle-même.

— Ça se peut bien, Madame, répartit complaisamment la bonne ; je ne m’en rappelle pas, voilà tout. Seulement, il paraît que sa profession lui faisait beaucoup d’honneur parce que tout le monde le louangeait et l’invitait dans la ville. Lui, eh bien ! s’il avait osé, il n’aurait plus bougé de chez nous. Ah ! le brave garçon que c’était ! Monsieur et Madame Gaud l’aimaient déjà bien, le grand-