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tôt elle se mettait devant sa table pour lire ou pour travailler, et malheur si on la touchait quand elle était comme ça, on seulement si le bruit qu’elle faisait la réveillait trop brusquement !

Oh ! Seigneur, que de soucis et d’ennuis cette enfant nous donnait, et tout de même elle restait si douce qu’on aurait dit un agneau, ce qui fait que tout le monde l’aimait, malgré le tourment qu’elle nous faisait avoir.

Dans ce temps-là, son père gagnait autant d’argent qu’il voulait comme médecin des bains ; son salon et son cabinet se remplissaient chaque matin de malades, et, le soir, il venait encore des personnes de la ville et des étrangers faire visite à toute la famille. Ça faisait un grand remue-ménage chez nous, et bien souvent nos dames allaient faire des parties de plaisir un peu ici, un peu là avec leurs amis et leurs connaissances. La jeune demoiselle aimait beaucoup à voir bouger autour d’elle, et il n’y avait rien à dire là-dessus.

Une année, juste que Régine finissait ses dix-sept ans, au commencement de l’été, un jeune Monsieur de Paris vint se loger dans la maison en face de la nôtre.

Celui-là n’était pas aux bains pour se guérir, il avait de trop bonnes jambes pour être malade. On le voyait partir tous les jours de grand matin pour un endroit ou pour un autre, et souvent c’était nuit quand il rentrait chez lui. Je ne sais pas comment il avait fait connaissance avec mes maîtres, peut-