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était triste de faire un mariage dans une maison où la mort allait d’abord entrer, on ne put pas le laisser mourir sans lui donner la consolation qu’il demandait.

Donc, M. Emmanuel vint de Paris, avec son frère et un autre parent, un peu à l’avance, et quand tous les papiers furent prêts, on fit la cérémonie.

Oh ! mon Dieu, que c’était beau d’un côté et comme ça serrait le cœur de l’autre ! Quand je vis revenir de l’église notre chère petite Régine aussi belle que la Vierge un jour de vogue, toute blanche et toute pâle, donnant le bras à son beau mari què semblait avoir des rayons tout le tour de la tête ; quand je les vis entrer dans la chambre de grand-père et se mettre à genoux devant son lit, je mis mon tablier sur ma figure pour ne pas en voir davantage et je redescendis vite, vite, en pleurant : je ne pouvais pas eomprendre qu’on fit une noce comme ça.

Tout le jour, la maison resta pleine d’invités . M. Desroches avait voulu que tout se passât comme s’il avait été à table avec eux ; c’était son idée et on m’osait pas le contrarier. Après le repas, les mariés montèrent près de lui ; il leur parla bien doucement :

— Allons, mes enfants, vous allez partir ce soir ; soyez bien heureux, mais revenez dans la quinzaine, n’est-ce pas ?… Je ferai ce que je pourrai pour vous attendre ; eependant… vous savez… un grand-père ne peut pas toujours durer…