Page:Gex - Vieilles gens et vieilles choses (1885).pdf/167

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 160 —

raisons qui auraient pu faire manquer le mariage de Régine, et pourtant tout fut réglé en un tour de main comme un papier de musique, sans seulement qu’en pût savoir comment cela était arrivé.

On pensait attendre l’autre été pour les épousailles ; tout de même, nos dames avaient assez de besogne tracée jusque-là. Mademoiselle Régine, cependant, n’était pas si bien portante depuis que son prétendu lui manquait. On aurait vraiment dit qu’il était sa vie, son souffle, sa santé. La pauvre petite faisait tout son possible pour paraître tranquille pendant le jour, mais ses nuits redevenaient mauvaises et sa maladie reparaissait de temps en temps. Je n’osais pas dire à sa mère toutes les fois qu’elle me faisait veiller et que je passais des heures dans les transes…

Voilà que quand l’hiver arriva, Monsieur Desroches fut obligé de se coucher et tout de suite il devint bien malade. Ce cher homme sentait qu’il s’en allait, et son grand tourment était de ne pas voir sa petite mignonne mariée et heureuse ; il répétait tous les jours :

— Ah ! si je pouvais aller au moins jusqu’au printemps, je ferais devancer la noce !…

Personne n’osait croire qu’il reverrait les nouvelles feuilles, mais les vieux tiennent quelquefois plus longtemps tête à la maladie que les jeunes : c’est justement ce qui arriva pour lui. Le mois de mars revint, que le grand-père vivait toujours. Alors il fallut le contenter, et malgré que tout le monde