Page:Gex - Vieilles gens et vieilles choses (1885).pdf/198

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 191 —

c’était là une suprême ressource à laquelle elle ne comptait recourir qu’au dernier moment.

Catheline, pour tous ces motifs, se montrait assidue et infatigable auprès de la pauvre Marie. Rien qu’à l’entendre vanter ses recettes, la charbonnière se sentait réconfortée, et chaque remarque sentencieuse de l’incorrigible bavarde lui semblait parole d’Evangile.

Cependant, les breuvages succédaient aux emplâtres sans améliorer l’état de la malade. Ce résultat tout à fait imprévu plongea les commères dans la stupeur. L’inefficacité de remèdes tant de fois éprouvés, non seulement les mortifia, mais leur fit naître le soupçon qu’un mal si foudroyant et si rebelle pourrait bien être l’effet d’une intervention surnaturelle, ou seulement d’un sortilége qu’il s’agissait de conjurer le plus vite possible.

Sur ce point encore, la Bardasse fut d’un grand secours : personne certainement ne possédait comme elle le répertoire complet des incantations, pratiques, remèdes, oraisons et mots mystiques destinés à délivrer des obsessions auxquelles se croyaient en butte les habitants de nos villages.

Il fallait en effet une dose de perspicacité peu commune pour discerner, dans le cas présent si l’on avait à combattre un mal donné ou bien une dégrâce, deux choses totalement opposées, puisque la première procède de sortiléges ou maléfices dus à la méchanceté humaine, tandis que la seconde provient de l’intervention céleste, que la dégrâce