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celui de la messe, et, séparant le jaune du blanc, il jeta brusquement celui-ci dans l’eau. Le blanc d’œuf alla au fond : le chevrier se mordit les lèvres ; la Bardasse hocha la tête ; les autres se regardèrent avec terreur. Jean et sa femme n’avaient pas un fil de leur chemise qui ne fût trempé de sueur.

— Ah ! Jésus ! Maria ! dites-moi si c’est bon ou mauvais, s’écria la mère.

— Il y a bien du mal de fait, articula sentencieusement Gaspard : l’œuf marque que c’est une dégrâce majeure, voilà tout. Mais à présent il faut savoir où la petite est attachée.

Sans doute, bon nombre de nos lecteurs n’auront pas compris la signification de ces mots mystérieux : « Il faut savoir où la petite est attachée. » Pour ceux-là, je donnerai quelques brièves explications sur une croyance encore en grand honneur de nos jours parmi les paysans, hommes et femmes, restés plus qu’on ne le pense sous la domination des idées mystiques du passé.

Être attaché c’est être voué, à son insu et par la seule permission de Dieu, à tel ou tel sanctuaire du pays ou de l’étranger.

Il n’est pas à dire que chacun soit soumis à l’influence occulte d’une madone célèbre ou d’un saint renommé, non ! souvent la vie entière s’écoule sans qu’on ait l’occasion de la constater ; par contre, il arrive aussi que, dès les premiers jours de l’existence d’un enfant, on remarque chez lui les symptô-