Page:Gex - Vieilles gens et vieilles choses (1885).pdf/228

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 221 —

tissantes les coquemars ventrus, les larges marmites de fonte, les cloches, les poêlons, les cafetières fumaient et bouillaient à qui mieux mieux de chaque côté de la flamme claire et ardente du foyer, au devant duquel se dorait lentement un énorme gigot, incessamment retourné sur la flèche d’un tournebroche monumental. Plus loin, sur un potager vaste à rendre des trous à un fourneau d’auberge, roussissaient, fricassaient, gratinaient, mijotaient une kyrielle de mets activement surveillés par l’œil expert et la main diligente de dame Pernette, l’intendante et le cordon bleu du logis.

On entendait un peu partout dans la maison les gros rires et les joyeux propos des invités : les uns aidant l’amphitryon à classer méthodiquement les vins que l’on allait déguster, d’autres flânant à travers les salons et les chambres, en gens habitués au sans-gêne des réceptions du vieux juge.

Ce fut au milieu du brouhaha de ces futures ripailles que l’avisé Rogne-Clou fit son entrée inattendue. Certes, on était peu habitué à chanter l’Alleluia à sa venue ; mais à cette heure, il se présentait avec une mine si avenante, avec un regard si aiguisé de convoitise, qu’il fut accueilli à bras ouverts par tous ces bons vivants en veine de liesse et de goinfrerie.

En temps ordinaire, les repas de nos aïeux duraient longtemps déjà ; mais s’agissait-il de gala, on n’en finissait plus.

Les convives du prodigue Mauriennais virent