Page:Gex - Vieilles gens et vieilles choses (1885).pdf/245

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 238 —

années, cette Jeanne des Avé, et voilà qu’il la retrouvait, lui, en pleine nuit, dans un pays où elle n’avait, à sa connaissance, ni feu ni lieu… Et cette chèvre qui comprenait la parole humaine mieux que quantité de villageois ne comprennent les prônes du dimanche ?… C’était louche, louche, mais qu’y faire ? Il fallait bien se confier à la seule main secourable qui lui était tendue.


CHAPITRE XII


Où maître Jean fait une nouvelle connaissance.


La vieille n’avait pas menti d’une syllabe, il n’y avait guère que trente pas à faire pour atteindre le ruisseau ; mais tel que maître Jean était accommodé, il lui fallut un grand quart d’heure pour y arriver en boîtant et geignant à faire pitié.

Enfin, après bien des haltes, nos deux personnages se trouvèrent tout près de la pierre du nant, où gisait le cadavre déjà raidi du pauvre Rustique, sans doute mort foudroyé par un coup de sang avant d’avoir pu franchir le cours d’eau fort grossi par la fonte des neiges.

Quelques rayons obliques de lune, glissant à travers les branches embrouillées des hauts noyers, dessinaient par place les contours de cette carcasse