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qui donc t’as bannie de nos mœurs ?… Ces relations si cordiales qui donc les a brisées ?… Alors, pères et mères voyaient, sans souci de l’avenir, croître autour d’eux leurs enfants, fillettes et garçons, dont leurs juvéniles amitiés promettaient de continuer les traditions de la famille et du foyer… Rien ne divisait ces cœurs destinés à vivre sur le même sol, à se nourrir des mêmes idées et des mêmes exemples… Aujourd’hui…

Mais, voyez un peu où s’en va courir ma plume, à propos d’une escapade de deux bambins !…

Je reprends bien vite mon récit pour ne plus l’interrompre.

Donc, par suite d’une convocation imprévue, un matin grand’mère, après avoir revêtu sa robe de cérémonie et mis son chapeau à fleurs, me dit qu’étant obligée d’aller en ville et peut-être d’y coucher le soir, j’irais passer la journée chez madame V., qu’elle avait priée de me garder pendant son absence. Je promis, comme de coutume d’être bien sage et bien honnête, et la chère femme partit tout-à-fait rassurée.

J’aimais beaucoup à dîner dans la maison de nos amis. Gasparde, la cuisinière, connaissait à fond le répertoire des friandises agréables aux enfants. Puis il y avait tant de bonnes choses dans le grand placard de la salle à manger et dans le fruitier où l’excellente Mme V. nous mettait en prison quelquefois !… Et le jardin si beau et si grand, le verger avec ses longues allées sablées, le labyrinthe où