Page:Gex - Vieilles gens et vieilles choses (1885).pdf/97

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 90 —

Le lendemain, huit heures sonnaient à la grande horloge de la cuisine, que je dormais encore. Le bruit m’éveilla.

Oh ! les bons réveils de mon enfance ! Lorsque le reflet rose des montagnes ensoleillées illuminait toute notre chambre d’une joyeuse lumière !… lorsque mon regard, encore indécis et rempli des fantastiques visions des rêves de la nuit, cherchait dans l’angle de la fenêtre la chère et douce figure de grand mère occupée à ravauder des bas ou à raccommoder quelque accroc que j’avais fait la veille !… C’était mon premier plaisir — son baiser répondant à mon bonjour ! C’était aussi la première marque de son contentement ! Puls venait le déjeuner qu’elle allait me chercher des que j’avais les yeux ouverts, la grande tasse de bon laît crémeux dont j’étais si friande !…

Ce matin-là, j’eus beau regarder autour de moi, il n’y avait personne devant la petite table de travail… Tous les souvenirs de la veille me revinrent à l’esprit… Bonne-maman était fâchée… Je ne l’embrasserais pas, moi qui en avais tant besoin !… Tristement, je m’assis sur mon lit, et j’appelai… Josétte entra, portant mon déjeuner.

Cette seule circonstance me confirma dans l’idée que mon expiation commençait… et je puis vous assurer qu’elle fut dure !… Je pleurais bien moins du long séjour que je fis dans la cave à charbon que du profond repentir d’avoir tant chagrinė bonne-maman !…